Situé à Briord dans l’Ain, l’historique fabricant de meubles haut de gamme, Ligne Roset, a maintenu son cap pendant cette crise. Un enjeu de taille pour cet industriel aux 315 millions d’euros de chiffre d’affaires et aux près de 800 salariés dans le monde. Retour sur un chemin tracé… sur une ligne de crête, avec son Directeur Marketing : Antoine Roset. Partie 2/2
4) Un mot sur les aides du gouvernement. Est-ce/Était-ce suffisant ? En avez-vous fait l’usage ?
Ça a été assez remarquable honnêtement. Peu de pays ont fait ce que la France a réalisé, et dans des délais aussi rapides… Le New York Times a d’ailleurs salué la politique d’Emmanuel Macron à ce sujet. Ici en France, les gens ne se rendent pas forcément compte, pourtant sans ces aides, nous n’aurions pu traverser la crise. D’ailleurs notre augmentation du taux de chômage reste faible comparé aux États-Unis, où il a explosé…
En tant que chef d’entreprise, je sais en revanche ce que cet effort va représenter pour l’endettement du pays et également pour celui des générations futures, mais c’était nécessaire.
5) Depuis le 11 mai, comment les choses ont-elles évolué ?
Nos forces productives sont là, à 80 voire 85%, en fonction des fragilités de certains ou des problématiques de gardes d’enfants pour d’autres. Pour les fonctions back office, 60-70% des effectifs sont aujourd’hui présents, et cela augmente progressivement.
La Grande-Bretagne vient juste de reprendre, l’Amérique du Nord et du Sud connaissent toujours des situations très compliquées… 15% de notre marché reste encore très atteint. Nous sommes donc en redémarrage mais cela va encore prendre un peu de temps.
6) Pour vous, chefs d’entreprises, qu’a changé la crise ?
Je ne sais pas si la crise a diamétralement changé les choses. En tout cas elle a permis d’accélérer certains mouvements. Avant, nous nous donnions plus de temps, désormais nous mettons les bouchées doubles. Ce sera le cas pour la politique en matière de RSE par exemple, sur laquelle nous avons décidé d’aller plus loin, plus vite… Il en ira de même du processus de digitalisation. Nous ne savons pas de quoi demain sera fait, s’il y aura une seconde crise de ce genre etc. Nous nous devons donc d’avancer sur ce terrain.
Enfin, nous devons réorganiser les équipes et apprendre à travailler différemment. Davantage de télétravail, ou du moins plus d’attention vis-à-vis des besoins de chacun, plus d’échanges par visio, adaptation des horaires des magasins, nous devons forcément nous réinventer.
7) Beaucoup d’articles sont consacrés aux difficultés, ou au contraire aux efforts réalisés par les indépendants, petites PME ou au contraire les grands groupes, et vous les ETI ?
C’est vrai et cela semble assez injuste cette valorisation des uns, contrairement à celle des autres… D’autant plus dommage que les ETI représentent un bassin d’emplois considérable en France !
Dans cette crise d’ailleurs, on a beaucoup parlé des efforts des grands groupes comme LVMH ou Engie en matière de production de masques et/ou de gels hydro alcooliques… Nous, à notre échelle, nous avons donné tous les masques dont nous disposions aux hôpitaux de la région.
Mais au-delà de cet effort, notre combat de chaque jour a été de maintenir nos emplois et de continuer à faire vivre 800 personnes. C’est cela notre quotidien, nous sommes proches de nos salariés et de notre région. Nous les ETI, nous sommes majoritairement des industries, souvent familiales, et notre manière de traverser cette crise, c’est de continuer à prendre soin de nos salariés.
8) Arrivez-vous à maintenir une solidarité entre entreprises, entre ETI ou avec vos partenaires, quelle que soit leur taille ?
Nous sommes très à l’écoute de nos camarades en région, quel que soit le secteur… De notre côté, nous avons été aidés par le groupement syndical de l’Ameublement Français, et on peut vraiment dire que si la filière meuble redémarre correctement c’est aussi grâce à eux…
9) Un mot pour conclure
Cette crise sanitaire démontre que le besoin de production locale et Made in France est important… L’autre aspect qui a été mis en lumière, c’est le fait que notre économie était trop tournée vers le service, pas assez vers l’industrie.
Pour nous industriels, c’est donc plutôt une bonne nouvelle, nos savoir-faire sont mis en valeur, il faut les utiliser et continuer à les protéger, c’est notre avenir…