Raphaëlle Borneuf a fondé Bonport, le premier réseau de bulles privatives en libre accès au cœur des gares. Après un pilote en gare de Lille-Flandres et un premier site à Paris Montparnasse, Raphaëlle Borneuf prévoit d’ouvrir de nouveaux espaces. Rencontre.
Comment vous est venue l’idée de créer un réseau de bulles privatives en libre accès ?
J’ai travaillé durant 10 ans dans le secteur du conseil. Je voyageais énormément pour rendre visite à mes clients et je ne trouvais jamais d’endroit calme pour travailler ou même simplement pouvoir passer mes appels entre deux rendez-vous. Mes missions professionnelles du quotidien finissaient donc par s’accumuler et à empiéter sur mon temps personnel. Une source de stress partagée d’ailleurs par beaucoup de voyageurs d’affaires, comme le prouvent les études réalisées à ce sujet.
De cette expérience est née Bonport. Un moyen simple d’augmenter le bien-être de ses employés quand ils se déplacent et de les libérer de ce stress du temps perdu. Une heure travaillée pendant ses déplacements est une heure supplémentaire gagnée le soir, en famille ou avec ses amis. Nous permettons ainsi aux professionnels de travailler en toute sérénité lorsqu’ils ne sont pas au bureau, en leur permettant de s’isoler, de se connecter à une visioconférence, de travailler au sein d’un espace calme ou encore d’organiser un rendez-vous professionnel en toute confidentialité.
Quelles ont été les grandes étapes marquantes du projet ?
Notre établissement pilote a ouvert ses portes en gare de Lille-Flandres mi-2019, juste avant le début de la crise sanitaire. Ce pilote a rempli ses objectifs puisqu’il nous a permis de signer un second emplacement en gare parisienne, seulement quelques mois plus tard, à Montparnasse. 2019 a donc été l’année du démarrage, de la concrétisation de notre projet. Seulement, les mois qui ont suivi, nous avons dû affronter deux années de crise sanitaire. Une période de crise où nous avons su développer notre résilience. Nous ne pouvions pas bénéficier des aides mises en place puisque nous venions de nous lancer. Cependant, j’ai saisi cet épisode comme une opportunité, persuadée de la valeur et du potentiel du projet. La crise sanitaire nous a transformés. Elle a fait évoluer les modes de travail de manière considérable. Lorsque je me suis lancée, je m’adressais à un marché de voyageurs. Depuis la pandémie, notre offre répond aux potentiels besoins de tous les télétravailleurs car ils ne travaillent pas seulement depuis leur domicile et ont souvent besoin d’endroits calmes où se poser lorsqu’ils se rendent à des rendez-vous, retrouvent des collègues hors du bureau, où désirent simplement changer d’air.
En 2022, nous avons ainsi pu ouvrir notre second site au sein de la gare Montparnasse (notamment grâce au soutien de la région Île-de-France).
Ce phénomène s’est accentué avec la crise sanitaire et le développement du télétravail ?
Tout à fait. Le nomadisme s’est accentué, nous sommes plus libres de nos journées car il n’est plus impératif de se rendre au bureau tous les jours. Les visioconférences se sont démocratisées favorisant des modes de travailler à distance plus nomades que par le passé. Les déménagements se sont également multipliés, les Franciliens recherchant désormais les grands espaces et plus de nature. Conséquences : les allers-retours entre la Province et Paris sont de plus en plus fréquents. Chez Bonport, nous observons que de nombreux professionnels arrivent désormais en gare 2 à 3 h avant leur train, afin d’y terminer leur journée de travail. Ce qui nécessite de s’installer dans un espace de tranquillité tel que nos bulles privatives…
Quel est le business model de votre start-up ?
Chez Bonport, nos bulles privatives peuvent accueillir 1 à 4 personnes. Le service est payable à l’heure. Un espace commun cosy et chaleureux est également mis à disposition des professionnels, où Wi-Fi haut débit et consommations (café, thé, croissant…) sont en libre accès. Nous emménageons nous-mêmes les lieux et nous versons un loyer à notre bailleur.
Bonport a remporté le prix de l’innovation lors de l’événement de rentrée du monde du voyage d’affaires Univ’AirPlus 2021. Qu’est-ce que cela représente pour vous ?
Le fait d’avoir remporté ce prix a été très important, car la communauté de votants était composée de décideurs de grands groupes, nous avons pu nous adresser directement à cette population de cadres, de travel managers et de dirigeants d’entreprises (notre public cible), et avons obtenu, par ce trophée, une vraie reconnaissance de notre marché. C’est arrivé à un moment où notre activité était encore en stand-by (nous n’avons repris que quelques mois plus tard, au premier trimestre 2022 avec l’ouverture de Montparnasse) et où les déplacements professionnels n’avaient pas encore repris. Dans ce contexte, cette distinction a confirmé le bien-fondé de notre projet et m’a confortée dans ma décision d’être restée investie durant ces deux années de crise.
Quel est votre prochain challenge ?
Actuellement, nous sommes à +40 % de croissance mensuelle depuis l’ouverture du site de Montparnasse. Entre avril et mai 2022, nous enregistrons +100 % de croissance sur la location de bulles privatives. Cela démontre l’adoption de cette innovation sur une période récente.
En 2023, nous souhaitons nous développer dans la capitale parisienne en y implantant de nouveaux sites. Notre prochaine levée de fonds devrait nous aider à y parvenir. Nous avons pour ambition de devenir le leader des nouvelles infrastructures de travail en mobilité, en France et à l’International. Il faudra concrétiser ce souhait par étapes. La clé du succès serait également de prendre des parts sur le marché des entreprises. Aujourd’hui, nous nous adressons principalement à l’utilisateur final (employés, cadres, dirigeants…), mais, pour séduire les entreprises, nous devons nous implanter de manière plus large en région parisienne, mais également dans les grandes villes françaises.