Philippe Joffard, PDG Lafuma de 1984 à 2013
Il est des ETI familiales qui doivent parfois prendre la décision de repenser totalement leur organisation pour mieux rebondir. C’est le cas de Lafuma. À l’origine, trois frères : Victor, Alfred et Gabriel qui lancent le sac à dos à armatures métalliques qui accompagnera les premiers vacanciers français.
Mais passées les heures glorieuses, l’entreprise doit se réinventer : nouveaux actionnaires, vision internationale et surtout… entrée en Bourse. Un chemin tortueux mais maîtrisé par le géant de l’outdoor. Rencontre avec Philippe Joffard, son PDG de 1984 à 2013.
À quel moment du développement de Lafuma, avez-vous décidé d’introduire l’entreprise en bourse ?
L’entreprise était à un tournant… Fondée en 1930, la société a eu différents cycles de croissance avant de connaître une situation très compliquée au début des années 80. Je suis arrivé en 1984 et j’ai senti que l’une des clés pour renouer avec la croissance, était de sortir du giron exclusivement familial. En premier lieu, je voulais mettre fin à la consanguinité.
Nous avions besoin d’un regard extérieur et d’une lecture plus financière de l’entreprise. Nous avons donc commencé par ouvrir le capital à Siparex et Axa en 1989. L’arrivée de ces nouveaux actionnaires au capital de Lafuma a permis de créer un contexte logique et favorable à une introduction en bourse.
Quand avez-vous décidé d’y aller finalement ?
Après quelques occasions manquées en 1993 puis en 1995… C’est en mai 1997 que nous avons franchi ce cap.
Ce report a été lié à deux opérations stratégiques, la reprise des entreprises Millet et Le Chameau. Elles nous permettaient de compléter notre offre et de créer un véritable triptyque dans notre palette, faisant de Lafuma un leader de l’Outdoor. Nous devenions ainsi plus cohérents, « pluriels », diversifiés et d’une taille significative pour aller en Bourse.
Les signaux étaient au vert d’un point de vue économique ?
Début 80, on était dans un contexte où le second marché s’imposait comme une réponse quasi naturelle aux entreprises que l’on appelle aujourd’hui des ETI.
Cela paraissait évident de choisir cette option pour accélérer son développement, via la croissance externe et l’international.
Comment aviez-vous préparé cette entrée précisément… Et depuis quand ?
En 1993, nous avions commencé à anticiper, et dès 1995, que ce soit le management, nos partenaires externes, banques, conseils et communication, nous étions prêts. Au passage avoir des actionnaires financiers au capital est une parfaite préparation.
Comment se faire connaître et apprécier, ensuite ?
Avant l’introduction, nous devons effectuer une sorte de tour de France pour se présenter. Puis une grand-messe est organisée à Paris, pour nous au Pavillon Gabriel, où devant investisseurs, analystes financiers, journalistes, mais aussi clients, fournisseurs et amis, vous introduisez très formellement votre entreprise, le management au complet.
Vous y présentez votre histoire, votre stratégie, vos résultats, vos ambitions… C’est un cadre très positif et valorisant pour l’entreprise qui se prête à ce genre d’exercice.
Et l’introduction elle-même, pouvez-vous revenir sur la manière dont elle s’est déroulée ?
Dans les quelques jours qui suivent l’introduction, l’entreprise est cotée. Vous vous retrouvez chez Euronext pour savoir comment la cotation est reçue…
Ils nous ont donné une fourchette, établie en fonction de la demande qui avait un record avec plus 150 fois l’offre… Nous avons alors retenu de ne pas franchir la barre symbolique des 100 francs. Nous nous sommes donc calés juste en-dessous de ce prix, afin de favoriser la croissance du titre.