Historique, tout en étant ancré dans le présent et l’innovation, l’embouteilleur isardien Hermes-Boissons a su révéler toute son agilité pendant la crise. Aux portes de l’ETI avec ses 90 salariés et ses 40 millions d’euros de chiffre d’affaires, l’entreprise a tout d’une grande… et ce n’est pas les deux mois qui viennent de s’écouler qui changeront le cours des choses. Rencontre avec son Président Tom François. 2/2
Comment communique-t-on dans ce genre de crises ?
Nous avons mis en place une communication interne beaucoup plus poussée pendant cette période, avec la mise en place d’un comité de crise, des points réguliers au sein de toutes les équipes, et à l’extérieur du site vis-à-vis de nos clients, fournisseurs ou encore de la profession.
Sur le site ou via une communication digitale, nous avons relayé toutes les mesures prises impactant les salariés. Nous avons tenu à être très présents et transparents avec eux et force est de constater que leur engagement semble montrer que cette communication régulière et proactive a su porter ses fruits.
Concernant notre communication externe, nous avons multiplié les contacts, par tous les moyens, auprès des entreprises locales du secteur, afin d’échanger nos bonnes pratiques, avec les services de l’État, pour suivre les mesures prises, ou encore avec diverses organisations comme l’ANIA, UniJus ou Agrosphères, qui ont été de grands soutiens.
Nous avons aussi été régulièrement sollicités par les médias pour raconter la manière dont nous traversions la crise et/ou ce que nous faisions pour aider. Communiquer pendant cette période permet aussi de renforcer le sentiment d’appartenance de l’ensemble des collaborateurs.
Un mot sur la stratégie d’aide du gouvernement, pendant le confinement et aujourd’hui … Est-ce suffisant ? En avez-vous fait l’usage ?
À ce jour nous n’avons pas fait appel aux mesures de chômage partiel et avons donc maintenu les rémunérations de nos équipes. Nous avons sollicité un report d’échéances fiscales, accepté avec une très bonne réactivité par les services compétents. À ce sujet, je dirais que le prolongement de cette mesure serait intéressant, car l’activité n’est pour le moment pas encore repartie, et les entreprises pourraient avoir encore besoin d’un accompagnement de l’État pour s’en sortir…
S’agissant du PGE [1] (Prêt garanti par l’État), les critères d’application sont encore difficiles à lire mais il semble que cela évolue.
Plus globalement, les services de l’État avec lesquels nous étions en communication ont tous été réactifs et aidants.
Comment envisagez-vous l’après ? À quelle échéance, dans quelles conditions… ?
Ce qui est sûr, c’est qu’aujourd’hui, la reprise et/ou une quelconque date de retour à la normale est très incertaine. Or, nous entreprises, nous avons besoin pour que ce retour soit effectif, que les Français reprennent une activité « normale » dans ce nouvel environnement auquel nous nous préparons depuis 3 mois et avec toutes les précautions nécessaires.
Nous avons observé une vraie volonté de changement pendant la crise, aussi bien chez le consommateur, que pour les distributeurs et marques. Maintenant que le déconfinement est acté, les citoyens peuvent exprimer ces choix de consommation et être acteurs de la relance.
Cela étant, le 11 mai n’était qu’un point de départ pour la sortie de crise, plus symbolique que réel. En tant que dirigeant, je trouve qu’il est difficile de se projeter, car notre visibilité est très dégradée pour le moment.
Beaucoup d’articles sont consacrés aux difficultés des indépendants, aux petites PME ou au contraire aux enjeux des grands groupes, et vous les ETI ou PME en forte croissance ?
À ce stade il est difficile d’avoir une vision globale. Je constate néanmoins que la crise a permis de reconsidérer les industries alimentaires ainsi que l’importance du Made In France. On a remis l’église au milieu du village. L’agroalimentaire en France a ces dernières années été victime d’une certaine forme de bashing et cet épisode a mis en lumière notre utilité, l’implication et le courage des femmes et des hommes qui y œuvrent au quotidien. Cet élan de solidarité est un vrai moteur. J’espère que cette motivation va demeurer après crise.
Plus généralement je pense que cette crise aura aussi des résonnances durables sur les prises de conscience des consommateurs et leur manière d’acheter : plus frais, plus local… C’était déjà une demande qui émergeait des clients et elle s’est vue renforcer pendant la crise. Nous sommes donc aussi fiers de nous dire que les choix que nous avons faits dans notre entreprise vont dans ce sens.
Le mot de la fin ?
C’était / c’est une crise d’une violence inouïe… Mais, à la mesure du choc créé, cet épisode a révélé de grandes solidarités entre acteurs, partenaires, quels que soient les secteurs et les régions. En tant que PME c’est la démarche dans laquelle nous avons souhaité nous inscrire. Ces liens, parfois nouveaux, nous avons envie de les maintenir. Ce qui a émergé pendant la crise, doit perdurer voire progresser.
Nous entrons dans une période qui va demander beaucoup d’efforts d’adaptation de la part des entreprises. C’est ensemble que nous sortirons de cette crise.
[1] https://www.service-public.fr/professionnels-entreprises/vosdroits/F35201