Manger local et en circuit court ? C’est la promesse d’Alancienne, une jeune start-up qui propose un service de livraison à domicile de produits frais en direct de producteurs engagés, le tout en quelques clics. Paul Charlent, cofondateur de cette plateforme lancée en 2016 dans la région parisienne, s’engage pour redéfinir l’agriculture de demain.
Qu’est-ce qui vous a donné l’envie de vous lancer dans l’aventure entrepreneuriale ?
Lorsque j’étais étudiant à l’École centrale Paris, j’ai réalisé que j’avais des difficultés à me fournir en produits frais. J’ai donc commencé à rapporter de Normandie des paniers remplis de victuailles, pour moi mais aussi pour mes collègues. En revanche, à cette époque, il me semblait impossible de reproduire cela à grande échelle. C’est véritablement lors de mes études aux États-Unis, à Berkeley, que j’ai eu envie d’entreprendre. J’y ai rencontré mes associés et à notre retour en France, nous nous sommes lancés dans l’aventure Alancienne.
Vous avez choisi un positionnement ultra local et un modèle d’entreprise basé sur des circuits courts. Pourquoi avoir fait ce choix ?
Chaque région de France regorge de petits producteurs qui proposent un très large choix de produits. Malgré tout, beaucoup ignore qu’il est possible de composer nos assiettes à 90% d’aliments cultivés à moins de 50 ou 100 km de chez soi. Trop de produits consommés proviennent de l’autre bout de l’Europe, voire même de l’autre bout du monde, avec un nombre insensé d’intermédiaires. L’idée première derrière Alancienne était donc de redonner du sens à notre consommation en proposant des produits ultrafrais au goût incomparable. Pour ce faire, il fallait que le temps entre le champs et l’assiette soit le plus court possible. C’est pourquoi, depuis 2016, nous livrons le soir les produits que nos producteurs locaux ont cueillis le matin-même.
Le 1er juillet dernier, Bpifrance et France Digitale ont fait d’Alancienne l’une des vingt start-up à impact positif qui « œuvrent pour l’accès à une alimentation saine et durable en France ». Comment entrevoyez-vous l’industrie agro-alimentaire de demain ?
Le maître-mot dans le secteur de l’alimentation est la transparence. Les consommateurs veulent savoir d’où proviennent les aliments qu’ils achètent, comment ils ont été acheminés et dans quelles conditions. Si les géants agroalimentaires devaient payer le coût de leurs émissions de particules fines, importer des produits de Chine, par exemple, reviendrait extrêmement cher. Pour redonner du sens à notre consommation, nous nous sommes spécialisés en agroécologie, une approche qui consiste à adopter un ensemble de pratiques agricoles respectueuses de l’environnement.
Ainsi, nous allons à la rencontre de tous nos producteurs et regardons comment ils travaillent. Nous les accompagnons aussi vers des pratiques encore plus vertueuses, notamment grâce au réseau d’entraide qui s’est constitué au sein d’Alancienne. Nous avons également bâti notre ferme, la ferme de l’Envol, où l’on met en œuvre des techniques glanées chez nos producteurs. Nous voulons prouver que l’agroécologie, c’est un modèle qui marche et qui plus est, un modèle qui peut être très rentable.
Comment la crise sanitaire a-t-elle impacté Alancienne ?
Lors du premier confinement, en moins de deux semaines, nous avons reçu cinq fois plus de commandes. Cela a impacté très positivement Alancienne, mais aussi nos producteurs qui travaillaient habituellement avec les restaurants. Cela leur a permis d’écouler leurs volumes et d’évité le gaspillage de leurs denrées. Les consommateurs se sont également rendus compte qu’il y avait des produits issus de l’agriculture locale à deux pas de chez eux, à portée de clic, livrés ultra facilement. Même si les habitudes sont dures à défaire, nous sommes convaincus qu’un changement des mentalités est en train de s’opérer.
Vous êtes présent à Paris ainsi qu’à Lyon. Quelles sont vos perspectives de développement ?
Ces dernières années, nous avons réussi à prouver la rentabilité de notre modèle. Nous avons organisé une levée de fond qui nous a permis de récolter près de 400 000 euros pour pouvoir changer d’échelle. Nous avons aussi constaté un intérêt croissant des gens envers une consommation plus raisonnée. Nos clients aiment nos valeurs, le service que l’on propose, mais surtout nos produits qui ne sont pas comparables à ce que l’on retrouve en grande surface. Nous avons réussi à fidéliser nos clients, et continuons notre développement en nous implantant très prochainement dans la région de Bordeaux, avec l’espoir d’étendre nos services à six ou sept autres grandes villes de France. Nous souhaiterions également essaimer notre ferme dans d’autres régions et accompagner un nombre croissant de producteurs dans le mouvement de l’agroécologie. C’est à notre sens la seule solution pour lutter contre le changement climatique.