Fort de plus de 200 ans d’existence, le groupe Siat est un acteur majeur de la filière bois en France. Rencontre avec son directeur général, Marc Siat qui incarne la sixième génération de dirigeants de cette entreprise familiale innovante et éco-responsable.
QUELLE EST LA GENÈSE DU GROUPE SIAT ? SA SINGULARITÉ ?
C’est une très longue histoire. Siat c’est 203 ans d’histoire pour être précis. Tout commence avec mon arrière-arrière-grand-père qui fait l’acquisition d’un moulin en 1818. Un moulin à grains qu’il transforme en moulin à bois.
L’histoire de l’entreprise est étroitement liée à l’histoire de l’Alsace et à celle des nouvelles technologies. Précurseurs, nous avons souvent recouru aux innovations technologiques en amont de la concurrence. Ce qui explique sans doute pourquoi nous sommes encore là aujourd’hui. Nous avons été parmi les premières entreprises de la filière à utiliser la machine à vapeur, à utiliser l’énergie électrique et à générer de l’électricité.
Un autre marqueur fort par rapport à la concurrence : la structure de notre clientèle. Nous ne livrons pas les clients de nos clients. Nous fournissons uniquement le négoce et la grande surface de bricolage.
QUELLE EST LA PLACE DE LA RSE DANS VOTRE STRATÉGIE ?
Nous fonctionnons sur des circuits relativement courts tant à l’amont qu’à l’aval. Pratiquement tous nos bois sont sourcés dans un périmètre de 100 km. Nous nous interdisons d’aller chercher du bois loin, ce qui est une pratique peu répandue dans notre secteur. Quant à l’aval, nous servons des clients qui se trouvent à proximité. Nous faisons peu d’export.
On ne se voyait pas livrer des clients qui se trouvent dans le sud de la France avec du bois venant d’Alsace, car ce matériau est à la fois pondéreux et volumineux. C’est pourquoi nous nous sommes étendus en nous implantant en Occitanie, à travers deux sites de production.
Autre volet important de notre politique RSE, nous sommes sur une logique zéro déchet. Celle-ci est poussée assez loin. Concrètement, toute la matière entrante sur site est transformée sur site. La matière entrante c’est le tronc d’arbre, sur lequel on va réaliser un maximum de sciages. Nous faisons également du granulé de bois avec la sciure, de l’électricité avec l’écorce, ceci en la brûlant. Ce qui permet à Siat d’être autonome en électricité.
QUELS SONT LES DÉFIS QUE LE FILIÈRE BOIS DOIT AFFRONTER ?
La sécheresse induite par le réchauffement climatique est un sujet majeur. Nous observons des massifs forestiers qui souffrent. On l’a vu dans les Vosges avec le développement des scolytes. L’Occitanie est également concernée. Disons-le : la forêt française est en grande difficulté. Les changements climatiques récents ont dénaturé les forêts.
Actuellement, nous trouvons du bois en abondance sur le marché. En outre, la disponibilité de la matière à horizon 10 ou 15 ans est un sujet qui nous préoccupe.
Un autre défi devra être relevé, c’est celui de l’acceptabilité sociétale de l’industrie du bois. Nous connaissons aujourd’hui une situation très paradoxale. Tout le monde veut du bois, pouvoirs publics et particuliers. Cependant, nombreux sont ceux refusant que des arbres soient coupés. Ce phénomène risque de finir par poser problème. Concrètement si l’on veut remplacer le béton par du bois, il va falloir accepter l’industrie qui en découle. Sinon à terme nous serons obligés de nous approvisionner avec du bois provenant de l’étranger.
Enfin, se pose la question de l’employabilité dans les entreprises de travaux forestiers (ETF). De moins en moins de jeunes veulent rejoindre notre industrie. Il y a des métiers en tension, le bûcheronnage en fait partie. Difficile socialement d’exercer cette profession à l’heure où le fait de couper du bois a mauvaise presse. Dans les années à venir, il y aura de moins en moins de bûcherons.
COMMENT VOYEZ-VOUS L’AVENIR DE SIAT ?
Comme nous l’avons toujours fait, nous voulons continuer à accompagner l’évolution de la technologie. Il faut en avoir conscience : les bois que nous consommerons demain ne sont pas les bois d’hier. Les bois consommés au cours des prochaines années seront plus techniques, plus secs.
Nous tenons à conserver notre modèle de circuit court. Soucieux de faire vivre les territoires, nous souhaitons continuer à créer de l’emploi là où il y en a peu.
