La nécessité de déployer les ETI pour dynamiser la croissance en France fait l’unanimité. Toutefois, pour mettre tous les atouts de leur côté, ces entreprises doivent mener de front 4 sujets majeurs. Aussi bien l’internationalisation, l’adaptation de la gouvernance, la gestion des RH que l’évaluation de ses moyens. Telle est la recette de son succès.
Les chiffres sont là. La confiance des dirigeants des ETI est de retour, et ce depuis plusieurs mois. Cependant, la France compte encore environ deux fois moins d’ETI que l’Allemagne. Seulement 5 800, d’après les derniers chiffres pointés par le METI (Mouvement pour les Entreprises de Taille Intermédiaire), contre 12 500 outre-Rhin. À l’heure où l’internationalisation est de plus en plus forte et où les rapprochements d’acteurs sur un même secteur sont légion, il est urgent de doter les ETI des armes nécessaires dans les pôles d’excellence régionaux. Elles sont au nombre de quatre.
Ne pas buter sur un « plafond de croissance »
L’internationalisation. Pour grandir hors de ses frontières, une ETI doit être accompagnée de manière ciblée. Via un interlocuteur unique qui soit à la mesure de sa dimension. Ne disposant pas des mêmes moyens qu’un grand compte, elle doit trouver auprès de celui-ci l’ensemble des conseils dont elle a besoin. À charge pour lui de puiser dans son réseau de contacts, en France comme à l’international. Cela lui permettra ainsi d’identifier l’ensemble des expertises qui lui serviront à bâtir un accompagnement sur-mesure.
En outre, pour répondre à son besoin d’innovation et de changement, une ETI doit être en mesure d’adapter sa gouvernance. Encore plus que toute autre entreprise. La réflexion autour de l’évolution de celle-ci doit impérativement aller de pair avec ses objectifs de croissance. Ainsi, le dirigeant d’une ETI devra déléguer, animer un comité de direction et s’entourer des personnes les mieux qualifiées. Alors qu’un grand compte, porté par la force de sa marque, pourra y prêter moins d’importance. Une ETI doit être managée de façon globale, avec une équipe de direction élargie, quitte à réajuster son organisation lorsqu’elle atteint un nouveau stade de développement.
Son troisième impératif repose sur la gestion de ses ressources humaines. Non seulement l’équipe de direction doit être soudée et cohérente, mais elle doit aussi être capable de fidéliser ses collaborateurs. Cela est d’autant plus important qu’une ETI ne peut généralement pas compter sur la puissance de sa marque pour attirer les talents et nourrir sa dynamique.
De façon plus générale, une ETI doit être en mesure de s’assurer d’évaluer les moyens dont elle dispose pour relever ses défis concurrentiels. Disposant par essence de ressources plus limitées qu’un grand groupe, elle doit définir les priorités de ses chantiers. À défaut de quoi elle devra envisager d’autres perspectives pour ne pas buter sur un « plafond de croissance ». Elle pourra par exemple se rapprocher de grands groupes – comme cela est souvent le cas en France.
De l’intelligence collective pour une performance durable
Ces quatre prérequis sont la condition sine qua non pour que l’entreprise puisse affronter les évolutions réglementaires auxquelles elle est soumise, et plus spécifiquement, cette année, le RGPD ainsi que le prélèvement à la source. Bien qu’oeuvrant pour se conformer aux nouvelles réglementations, les ETI éprouveront du mal à en respecter les calendriers.
Du fait de l’importance de la mise en conformité au RGPD, elles ne seront probablement pas en mesure de mettre en place de façon structurée le prélèvement à la source avant le mois de septembre. Nul ne saurait considérer cela comme un facteur de fragilité ; toutefois, la surcharge de travail que ces mises en conformité induisent peut représenter une source d’inquiétude pour les ETI.
Ainsi, répondre aux chantiers réglementaires tout en structurant sa vision et en dopant sa performance au service de la croissance est un réel défi pour les ETI. De plus, la convergence des enjeux sociétaux et des enjeux de l’entreprise, la mobilisation des parties prenantes interne et externe, la valorisation des démarches emblématiques et la mesure de l’impact sociétal (éléments de preuve) sont autant de facteurs clés qui obligent à faire évoluer leur modèle. Dans l’entreprise considérée comme un organisme vivant, c’est une vision co-construite qui primera, afin de donner du sens a l’action individuelle, car sans intelligence collective, il n’y aura pas de performance durable.
Tribune de Jean-Michel Picaud parue dans Les Echos, le 13 Juillet 2018