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Jérôme Perrod (Buffet Crampon) : « Faire l’acquisition d’une marque, c’est adopter la communauté de musiciens qui va avec »

mars 10, 21
3 min. de lecture

Si la crise du Covid a favorisé les ventes d’instruments tels que les pianos et les guitares, leurs cousins à vent n’ont pas profité de cette dynamique. Situé dans les Yvelines, Buffet Crampon, leader mondial de la clarinette, n’a pas dérogé à ce constat. Entretien avec Jérôme Perrod, président de cette ETI presque bicentenaire qui redouble d’inventivité pour préparer la reprise.

Comment est né Buffet Crampon ?

Le début de notre histoire remonte à 1825, année durant laquelle Denis Buffet-Auger ouvre son atelier à Paris. Il rencontre rapidement un certain succès grâce à ses clarinettes à 13 clefs. En 1836, Buffet devient Buffet-Crampon quand son fils Jean-Louis, qui a repris le flambeau, se marie avec Zoé Crampon. Riche héritière, cette dernière lui propose en effet de le financer à la condition d’accoler son nom à celui de l’entreprise.

Comment la société s’est-elle développée depuis ?

Buffet Crampon a connu un succès important grâce à un système de clefs, appelé Boehm[1]. Celui-ci a été amélioré par Louis Auguste Buffet, oncle de Jean-Louis Buffet.

Buffet Crampon se développe également au cours du 19e siècle dans les autres instruments à vent, en 1866, l’entreprise fabrique par exemple ses premiers saxophones.

Au milieu du siècle suivant, c’est le luthier Robert Carré qui fait passer un nouveau cap à l’entreprise : il modifie la perce de clarinettes, la faisant passer d’un simple cylindre à une perce polycylindrique, avec différents diamètres, ce qui créé un son totalement nouveau. Cette innovation plait beaucoup aux musiciens américains de l’époque et la « R-13 » devient une référence aux États-Unis.

Depuis une vingtaine d’années, nous réalisons de nombreuses acquisitions de marques d’instruments à vent : Antoine Courtois (trombones et trompettes), Besson (marque française exportée en Angleterre et adoptée par tous les brass bands britanniques), B&S (tubas, cors d’harmonie), et plus récemment Powell, Rigoutat ou encore la société Parmenon.

Pourquoi avoir fait le choix de multiplier les acquisitions ?

Nous représentons 85 % du marché mondial des clarinettes à usage professionnel, nos perspectives de croissance ne peuvent donc pas se faire sur les parts de marché. Concernant la trompette ou le saxophone, nous avons moins de 10 % du marché, les possibilités sont donc plus importantes. Faire changer de marque à un musicien, c’est un processus assez long. Il est donc plus pertinent d’acheter de nouvelles marques plutôt que d’étendre la sienne à d’autres instruments, car faire l’acquisition d’une marque, c’est adopter la communauté de musiciens qui va avec.

Avant le Covid, nous connaissions une trajectoire de croissance de 5 à 7 % par an, avec pour objectif de garder ce rythme en combinant acquisitions et croissance organique, grâce au développement du marché des instruments d’étude. L’entreprise faisait 70 millions d’euros de chiffre d’affaires annuel quand je suis arrivé en 2014 et en 2019, notre CA avait atteint 100 millions d’euros…

Malgré la crise qui nous frappe depuis plus d’un an, vous avez annoncé l’ouverture d’une usine en Chine en septembre 2020. Où en est le projet ?

Ce processus a bien évidemment été initié avant 2020. Nous souhaitions produire des instruments d’étude, avec des coûts de fabrication réduits mais en conservant notre savoir-faire. La crise Covid est venue perturber notre développement et les volumes prévus par cette usine ont été impactés. Aujourd’hui, l’outil est en place et nous attendons que la crise s’arrête pour relancer le projet.

Est-ce que la crise a fortement impacté vos ventes ?

Nous avons été frappés assez durement. Les guitares et les claviers se sont bien vendus en ligne pendant la crise, contrairement aux instruments à vent. Beaucoup de gens soupçonnaient en effet ceux-ci de propager le virus, ce qui n’est pas le cas si on a du bon sens et que l’on prend des précautions. Ce qui nous pénalise surtout, c’est qu’on ne démarre ou redémarre pas la pratique d’un instrument à vent sans un professeur, à la différence du piano ou de la guitare.

Comment envisagez-vous la reprise ?

Nous sommes assez confiants sur le redémarrage et nous avons plusieurs projets. Nous allons proposer une nouvelle offre de produits, afin de donner un appétit supplémentaire aux musiciens qui auront été frustrés pendant près de deux ans. Nous travaillons également sur une nouvelle interface commerciale en ligne accessible à nos clients, magasins et écoles de musique.

Être en communication permanente avec nos équipes, nos clients et les communautés de musiciens nous permet de préparer cette reprise, nous voyons ainsi comment le marché évolue et identifions les grandes tendances qui vont se pérenniser à l’issue de la crise.

Quels conseils donneriez-vous à un entrepreneur également frappé par la crise ?

Ce qui a été déterminant pour nous, c’est notre capacité à anticiper les effets de la crise. En étant présent en Chine, nous avons pu nous préparer aux conséquences. Nous avons adapté nos structures en prévoyant assez bas et nos plans worst cases se sont avérés être les bons. Nous préparer aux situations les plus difficiles nous a donc permis de mieux les gérer.

[1] Du nom de son inventeur Théobald Boehm.

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